L’emballement de l’urgence

La rhétorique de l’urgence a progressivement envahi le champ médiatique occidental des dernières décennies, comme si le monde était entré dans une sorte d’élévation progressive de la température de l’urgence. Nous en entendons parler à l’occasion des catastrophes humanitaires, de manière ponctuelle, mais il semble qu’un cycle d’urgences se soit installé graduellement, qui a finit par devenir une réalité quotidienne. Par effet d’accumulation, l’urgence tend à devenir « normale ».  

Un monde en état d’urgence

D’après l’ONU, 690 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde, dont 135 millions sont en situation de survie. À un certain niveau, les chiffres ne veulent plus rien dire : imaginez simplement que toute l’Europe (746 millions d’habitants) passe sous un régime de pénurie alimentaire durable (famine) et que les populations cumulées de la France et l’Allemagne soient en état de malnutrition sévère (anémie, apathie, asthénie, perte poids, fonte musculaire, œdèmes, malformations, retards ou arrêts de croissance, séquelles mentales irréversibles chez les enfants). Que cette situation dramatique se déploie au Nord ou au Sud, elle s’impose comme une urgence humaine et humanitaire : l’UNICEF estime qu’un enfant de moins de 15 ans meurt toutes les 5 secondes à cause du manque de nourriture (soit plus de 6 millions par an). Bien pire que la pandémie.

Un état d’urgence permanent

Dans les pays occidentaux, l’urgence s’est imposée comme une réponse indispensable au manque de sécurité : depuis 2015, la France s’est placée en ÉTAT D’URGENCE PERMANENT, avec son plan Vigipirate et l’opération anti-terroriste « Sentinelle »; les habitants ont dû s’habituer à croiser des patrouilles de militaires armés dans leurs rues, ce qui correspond à un état de guerre, qui s’est progressivement banalisé. La population vit dans l’insécurité, sous la pression d’un ennemi insaisissable qui peut surgir n’importe où, et n’importe quand : lorsqu’on fait ses courses, se rend à son travail, ou qu’on se trouve à l’église. Depuis 2015, 304 personnes ont perdu la vie, et près de 800 autres ont été blessées. 59 attentats déjoués.

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Un état d’urgence qui s’affranchit des frontières 

Depuis début 2020, c’est L’ÉTAT D’URGENCE SANITAIRE qui s’est imposé, à toutes les nations, avec ses confinements de populations et ses couvre-feux : une autre ambiance de guerre, face à une autre menace omniprésente qui ne nous a pas laissé d’autre choix que de nous cacher, dans une sorte d’ambiance pré-apocalyptique, avec ses villes totalement désertées : « Les rois de la terre, les grands, les chefs militaires, les riches, les puissants, tous les esclaves et les hommes libres, se cachent dans les cavernes et dans les rochers des montagnes … »  (Apocalypse 6/15). Même avec des descriptions qui datent de 2000 ans, certaines visions prophétiques s’interprètent, à la lumière de nos circonstances, avec une nouvelle clarté, qui nous permet de comprendre que nous ne sommes pas si éloignés de leur réalisation.

La confrontation à l’urgence « naturelle » fait partie bien sûr des évènements inévitables de l’histoire de l’humanité, mais c’est la multiplication des sujets d’urgence et leur emballement qui a de quoi interpeller, surtout quand les manifestations revêtent une dimension planétaire. 

Lorsque la Bible parle d’évènements qui impactent « les nations » ou « toute la terre », nous savons que nous sommes en présence de phénomènes qui sortent du cadre des hasards naturels de l’Histoire. Surtout s’ils sont annoncés à l’avance.

Apocalypse 3/10, 13/3, 8 : « Parce que tu as gardé la parole de la persévérance en moi, je te garderai aussi à l’heure de la tentation qui va venir sur le monde entier, pour éprouver les habitants de la terre … Et je vis l’une de ses têtes comme frappée à mort ; et sa plaie mortelle avait été guérie ; et la terre tout entière était dans l’admiration de la bête … Et tous les habitants de la terre l’adoreront, ceux dont le nom n’a pas été écrit dès la fondation du monde dans le livre de vie de l’agneau qui a été immolé…».

« Le monde entier, la terre toute entière, tous les habitants de la terre … » : aujourd’hui, avec l’expérience de plus d’une année (18 mois à l’heure où cet article est publié) de confrontation à la pandémie (en grec pandemos signifie « tous les peuples »), cette idée hier impensable est devenue elle aussi vraisemblable, et nous comprenons effectivement que nous pouvons être tous atteints en même temps par un même fléau.

Un état d’urgence planétaire

Le 12 décembre dernier, le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, Antonio Guterres, a appelé le monde à « déclarer l’ÉTAT D’URGENCE CLIMATIQUE », lors de l’ouverture d’un sommet destiné à relancer les efforts de lutte contre le réchauffement climatique. C’est une autre urgence qui s’ajoute.

Les climato-sceptiques trouveront sans doute à redire, tant le sujet est controversé, avec ses experts et contre-experts. Mais une chose est sûre : le coût des catastrophes naturelles a doublé dans les deux dernières décennies, ce qui constitue un marqueur fiable du phénomène. L’augmentation enregistrée en 2020 est de + 26%. Sans entrer dans les débats scientifiques, retenons ici simplement que la Bible elle-même semble confirmer que les problèmes climatiques prendront de l’ampleur à la fin des temps, dans des proportions qui dépassent les prévisions les plus alarmistes :

« Il y aura des signes dans le soleil, dans la lune et dans les étoiles. Et sur la terre, il y aura de l’angoisse chez les nations qui ne sauront que faire, au bruit de la mer et des flots, les hommes rendant l’âme de terreur dans l’attente de ce qui surviendra pour la terre ; car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l’homme venant sur une nuée avec puissance et une grande gloire » (Luc 21/25 à 27). Ce sont des paroles de Jésus.

À chacun de voir si cette prophétie peut être comprise de manière littérale, ou symbolique. Mais un certain nombre d’éléments factuels semblent renforcer l’idée d’une dégradation qui s’amplifie, avec des traumatismes de plus en plus évidents : d’après un rapport de la Banque Mondiale, près de 140 millions de personnes pourraient devenir des réfugiés climatiques à brève échéance. 

Si c’est le cas, nous serions probablement entrés dans un cycle d’urgences en cascade qui sont à chaque fois une épreuve à laquelle l’humanité doit faire face, mais dont l’effet cumulatif représente également une épreuve en soi — un peu comme ce que l’Égypte a vécu durant les 10 plaies. L’Esprit de la prophétie évoque à ce sujet l’image de l’accouchement, avec des douleurs dont l’intensité augmente et qui sont de plus en plus rapprochées, jusqu’à l’enfantement – dont on ne peut connaître ni le jour ni l’heure, mais dont on sait que l’issue est proche.

Et l’urgence spirituelle ?

Les urgences du monde — sanitaires, écologiques, économiques, humanitaires, sécuritaires — ne sont pas sans influence sur le sentiment d’urgence spirituelle que nous pouvons (et devrions) ressentir mais elle ne peuvent pas se substituer au cœur du sujet, qui est le recul de la foi. Ceux qui construisent une perception « prophétique » avec les évènements d’aujourd’hui réduisent l’inspiration prophétique à être un des wagons du train de l’actualité. En général, ce message émotionnel ne produit pas la foi, mais la peur, l’angoisse, l’agitation, la colère, le désordre.

Si notre baromètre spirituel se met en mouvement seulement sous la montée en température des crises, alors que se passera-t-il lorsque les choses se calmeront ? Notre «inspiration» spirituelle refroidira, et ce sera la preuve qu’elle était alimentée davantage par des sentiments et des émotions, que par des révélations.

En réalité, notre perception de l’urgence spirituelle doit reposer sur d’autres critères, qui tiennent davantage au combat entre la lumière et les ténèbres, à la vérité contre le mensonge, à la vie contre la mort, avec un enjeu central qui est le Seigneur lui-même. Parce c’est en Christ que tout existe et hors Christ que tout est mort.

On nous trompe lorsqu’on nous entraîne dans une croisade pour notre religion contre une autre. Ou pour notre civilisation contre une autre. On nous trompe lorsqu’on nous entraîne dans un combat pour nos libertés religieuses ou pour un parti politique supposément chrétien. Et on se trompe soi-même lorsque notre eschatologie nous conduit à faire de certains sujets (la marque de la Bête, de l’enlèvement, de l’avènement de l’antichrist), des sujets centraux. Ce qui est central, c’est le droit de Christ, ici et maintenant, de recevoir de moi la louange, l’honneur, la gloire, et le couronnement, la royauté de ma vie, de mes pensées, de mes sentiments, de mes émotions, de mes actions et de toutes mes forces. C’est cela, rechercher premièrement le royaume et la justice de Dieu : trouver le Roi et lui remettre toutes choses. Une sorte d’urgence spirituelle.

Autour de nous, et en nous, l’appel à la sanctification est présent, pour ceux qui ont des oreilles pour entendre, tout simplement parce que c’est ce que dit la voix de l’Esprit depuis le saint des saint, dans le temple intérieur de notre cœur : « Que celui qui se sanctifie, se sanctifie encore » … et : « sans la séparation (d’avec le monde, le péché, le moi) nul ne verra le SEIGNEUR ».

JérômePrekel2021©www.lesarment.com

4 comments On L’emballement de l’urgence

  • Bonjour Jérôme,
    C’est vrai, il y a urgence à fuir la corruption qui existe dans le monde par la convoitise pour participer à la nature divine,
    Il y a urgence à être revêtu de Christ et d’être trouvé vêtu et non pas nu, vu que le jour approche.
    Je crois que bon nombre d’entre nous on besoin d’entendre ce que les anges ont dit à Lot : Échappe toi pour ta vie !
    Michael

    • Bonjour Michael,
      Merci pour le commentaire. Je me suis permis d’ajouter des liens derrière tes citations, afin que ceux qui le souhaitent puissent localiser les versets auxquels tu faisais allusion sans les citer. Ainsi tu démontres que nous pouvons « parler la Parole », et la faire parler, parce qu’elle est pertinente dans ce qu’elle dit de la situation d’aujourd’hui, et de demain, comme elle l’était des situations d’hier. C’est le miracle de cette Parole vivante qui nous a été laissée, comme une lumière sur notre sentier. Merci Seigneur ! Comme nous avons raison de nous en remplir, elle est en réalité une nourriture et un breuvage, et elle est pleinement suffisante pour nous conduire.

  • Bonjour
    Très intéressant votre article
    Restons aux pieds de Jésus nous qui avons mis notre espérance en lui Amen

  • Oui il y a urgence à la sanctification : «  Que celui qui est injuste soit encore injuste, que celui qui est souillé se souille encore; et que le juste pratique encore la justice, et que celui qui est saint se sanctifie encore.«  Apocalypse 22 :11.
    Sachant que Jésus a été fait pour nous sanctification (1Corinthiens 1:30), c’est par la’ foi et par l’action du Saint Esprit que nous sommes sanctifiés et non par nos efforts ou par nos œuvres.. Croyons dans l’oeuvre de La Croix où tout a été’ accompli , non seulement notre justification mais aussi notre sanctification. Laissons le Saint Esprit agir en nous pour nous transformer afin que nous’ puissions produire les œuvres bonnes que Dieu a préparé d’avance. Être rempli du Saint Esprit, c’est produire le fruit de l’esprit (la voie par excellence).

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