Un rappeur évangélique américain abandonne la foi

Le 17 janvier dernier, après 30 ans d’engagement chrétien de premier plan, Brady « Phanatik » Goodwin, chanteur du groupe de rap chrétien The Cross Movement, a déclaré dans une vidéo sur son compte Facebook qu’il renonçait au christianisme. Il a écrit une lettre à son église pour démissionner de ses fonctions et « dénoncer la foi chrétienne qu’il a crue, professée, proclamée et défendue au cours des 30 dernières années de sa vie ».

Les raisons invoquées

Dans cette vidéo jugée plutôt sincère par les commentateurs, Brady Goodwin (ex « Phanatik ») explique comment ses doutes ont commencé à se développer lorsqu’il s’est formé pour approfondir sa foi, au Lancaster Bible College, puis au Westminster Theological Seminary, dans le but de s’équiper dans son ministère. Dans la suite, il a enseigné l’apologétique.

Brady Goodwin a dit que découvrir de quelle manière les enseignants utilisent des ressources théologiques les plus anciennes pour arriver à la traduction et à l’interprétation du texte biblique a soulevé des questions pour lui. Il a comparé la théologie chrétienne à un Rubik’s cube qu’on manipule comme on veut pour lui faire dire ce qu’on veut. 

Le Dr Michaël Brown, de l’émission chrétienne « Line of fire », a tenu à écrire un commentaire à tout ça :

« Dans toutes mes études collégiales et supérieures (doctorat en langues et littératures du Proche-Orient de l’Université de New York, dont le but était de pouvoir lire le texte biblique original dans son contexte culturel et linguistique d’origine,), aucun de mes professeurs n’était un chrétien croyant en la Bible. Certains étaient même hostiles à la foi, profitant de chaque occasion pour ridiculiser les croyances bibliques conservatrices.

Au fil des années, plus j’étudiais et plus je me suis senti équipé pour affronter les objections à ma foi, et plus ma foi est devenue forte. Mon esprit était maintenant en parfaite harmonie avec mon coeur, mon intellect correspondait maintenant à mon expérience ».

Il existe vraisemblablement d’autres questions et d’autres problèmes à propos desquels le chanteur ne s’est pas (encore) livré et qui ont contribué à sa décision d’abandonner la foi. On peut imaginer que ça ne doit pas être simple de conserver une vie de disciple, lorsqu’on est sollicité (pour ne pas dire harcelé) par toutes les tentations qui caractérisent ce milieu du show-business. 

Un jour ou l’autre, la croyance et la foi doivent montrer leur différence

Aux États-Unis, le christianisme moderne se caractérise par une culture de plus en plus mondaine. Tout le monde parle de Jésus, et on devient souvent chrétien sur des bases plus culturelles que spirituelles. 

Hier, l’église assumait sa différence avec le monde et la société, dans presque tous les domaines, et les pécheurs craignaient de se joindre aux chrétiens (Actes 5/13), à cause de la sainteté de ces derniers et de la puissance qui agissait au milieu d’eux. Aujourd’hui, le christianisme culturel a produit une église qui fait tout pour ne pas dépayser les pécheurs qui proviennent du monde : venez comme vous êtes, regardez, on est comme vous. 

Un nouvel évangile

Ce relookage dépasse le niveau de la cosmétique et finit inévitablement par atteindre le centre de gravité de l’église. Et c’est le pragmatisme qui caractérise ce christianisme culturel qui en est le moteur. Le pragmatisme dit : « ce qui compte, c’est ce qui marche » et par extension : « ce qui ne marche pas doit être abandonné ». Tout ça « pour l’œuvre de Dieu », et assurer son développement, évidemment. Alors on range petit à petit dans un placard les sujets qui fâchent et qui procurent une gêne aux pécheurs : les messages de la repentance, du péché, du monde, de la perdition éternelle, de l’orgueil et de la croix. Et on va mettre en avant une psychologisation de la vérité, et une édification tournée vers le développement personnel, en évitant soigneusement tout ce qui touche de près ou de loin au renoncement à soi, reflet de la kénose. Et alors le centre de gravité se déplace, presque à l’insu des bonnes volontés qui veulent le meilleur pour l’église. 

Croyant, ou témoin ?

On peut tourner le problème dans tous les sens : du point de vue biblique, le chrétien est un témoin qui a vu quelque chose, rencontré une Personne, et qui peut aller très loin pour affirmer sa foi en un Dieu vivant. Puisque c’est une réalité. En grec, « témoin » sur dit « martus », qui a donné le mot « martyr ». La croyance (culturelle, religieuse ou intellectuelle) ne peut pas produire cette sorte de témoins-là. Nicodème représente la croyance, face à Jésus.

Vu de notre fenêtre, le cas Goodwin vient nous rappeler que le christianisme culturel atteint tôt ou tard ses limites, même lorsqu’il est armé d’une formation solide. Elle ne se voit pas, mais il y a une date de péremption sur le christianisme culturel, comme sur le christianisme religieux formaliste.

Un Dieu qui nous dépasse

Sans une expérience personnelle et intime de l’existence de Dieu (la reconnaissance de l’essentialité de Christ), toute la construction de la foi reposera sur une compréhension intellectuelle et sentimentale du divin, de la justice et de la vérité. 

Et il y manquera toujours une attestation intérieure, le dépôt, l’expérience de ce rayon de lumière éternelle qui entre dans le temple de l’intelligence, des émotions et de la volonté, pour y laisser le témoignage d’une rencontre hors norme, qui va entraîner un bouleversement.  Une transformation.

Dans l’arche de l’alliance, on avait justement déposé un peu de manne, qui témoignait au futur de ce que Dieu avait fait au passé en envoyant le pain du ciel. Une empreinte incontestable et indéniable. Parce qu’il faut que notre foi repose sur quelque chose de plus grand que nous, qui nous dépasse, un souvenir dont nous aurons besoin lorsque nous affronterons l’évidence, la raison, le réalisme, le visible, ou toutes les armées de l’enfer.

Il n’y a pas d’autre point de départ imaginable si on veut espérer atteindre le point d’arrivée : il faut une nouvelle naissance, pour voir le chemin, la vérité et la vie, pour voir le royaume et pour comprendre les voies de ce royaume. Parce qu’au cours de notre pèlerinage, que certains assimilent à une grande tribulation, il nous faudra tous affronter l’inacceptable et l’incompréhensible, et malgré tout continuer, ce qui est hors de portée de la croyance.

Pour une telle personne, il sera très difficile de renier le Seigneur, ou de blasphémer son nom.

6 comments On Un rappeur évangélique américain abandonne la foi

  • Bonjour Jérôme
    merci pour cet article qui nous rappelle combien notre foi doit être fondée sur Christ et sur une étroite relation personnelle et intime entre le disciple et son Maître.

    Malheureusement aujourd’hui comme tu le dis tout le monde est chrétien… Si bien que ce mot a perdu son sens premier… Le chrétien… Le messianique.. celui qui a cru .. qui a connu.. que Christ est le Fils du Dieu vivant.

    Sois béni et fortifié dans ta marche et dans ton service frère.

  • Dans cet article https://www.christianpost.com/voices/brady-goodwin-renounced-his-faith-here-is-my-response.html on peut lire « Et ce n’est pas parce que les traducteurs juifs de la Bible rendent certains mots-clés d’une manière et que les traducteurs chrétiens rendent ces mêmes mots d’une autre manière qu’une traduction n’est finalement pas meilleure que l’autre. » (trad. Google Traduction).

    Goodwin sait-il que les premiers chrétiens utilisaient la Bible (AT) grecque ?
    Celle-ci avait été traduite de l’hébreu par les Juifs pour ceux de la diaspora.

    Ainsi p.ex., dans l’épître aux Hébreux, les citations de l’AT proviennent de la Bible grecque.
    D’où parfois des différences avec nos AT actuels, traduits de l’hébreu.

    Or, cet AT hébreu (TM) ne date pas d’avant J-C, mais d’après J-C, donc est influencé par la concurrence du christianisme naissant.

    Longtemps on a été dans le déni face à cette réalité – on croyait que la version grecque inventait… jusqu’aux découvertes de Qumrân, qui ont résolu l’énigme: on sait maintenant que le grec, lorsqu’il s’écarte du TM, n’invente pas.

    Cf. https://bibletude.blogspot.com/2011/09/lxx.html

  • Hello Jérôme, ça m’a fait vraiment penser à Pierre qui a renié 3 fois le Seigneur . Puisse Dieu agir dans le coeur de ce rappeur pour qu’il revienne à Lui .. de même que pour tous les Pierre de ce monde qui renient ouvertement leur foi .

    • Oui Myriam, il y a toujours de l’espoir, même lorsqu’on tourne le dos à Dieu, même lorsqu’on prend la direction inverse, et qu’on finit dans le ventre d’un poisson ! Sa miséricorde dure à toujours.

      La différence entre Braddy Goodwin et Pierre, c’est que Pierre a renié pour sauver sa peau, alors qu’il croyait pleinement en Jésus, et qu’il l’aimait passionnément.
      Et dans le cas de Judas, c’est encore autre chose.
      Tous les reniements ne s’analysent pas de la même manière (on peut faire confiance à Dieu pour ça), et il n’y a évidemment pas de réponse unique : tous les reniements (et donc tous les adversaires) ne seront pas pardonnés, sinon il n’y aurait pas de péché contre l’Esprit.

  • Ce n’était pas une analyse Jérôme, juste un ressenti 😉 Bon dimanche

  • Bonjour Jérôme
    Apparament il était converti au christianisme et pas à Jésus-Christ, il n’y a pas l’empreinte de Christ ou Il est le fondement,
    Je lui souhaite de vraiment se convertir de coeur à Jésus-Christ, et de plus le connaître selon la chair.

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