Les prophètes de l’Eternel sont les déclinologues de leur temps

Déclinologue : personne qui entretient une vision pessimiste de la situation économique, politique, ou encore culturelle de son pays et qui estime que cette situation va se détériorer dans le futur.

Il ne fait aucun doute que les prophètes de Dieu ont pu être perçus (et continuent de l’être) comme les déclinologues de leur temps. Le plus souvent, ils sont porteurs d’un message qui communique davantage de désapprobation divine que d’approbation : ils appellent le peuple à revenir à l’Eternel lorsqu’il s’en écarte, et nous savons que ce phénomène est malheureusement récurrent.

À la lecture de la longue histoire du peuple de Dieu dans la Bible, nous avons l’impression de sentir la présence d’une force invisible qui paraît s’exercer d’une manière systématique sur le cœur de l’homme et le repousser loin du Créateur. Comme si l’effet de la commotion originelle produite en Eden, que nous appelons la Chute, fonctionnait à la manière d’un big bang spirituel : chassé de la présence de l’Eternel, la créature semble être le jouet d’une force qui l’écarte et l’emporte sans cesse loin de son Créateur[1].

C’est pourquoi les prophètes délivrent un message de retour, souvent défini comme un fardeau[2],  et souvent porteur de la réprobation de l’Eternel, tout en étant également mêlé de promesses. On pourrait donner une définition bien plus complète du statut de prophète et de l’étendue possible de son message (qui ne se résume pas à annoncer des catastrophes), mais ce n’est pas ici le propos. On retiendra simplement l’image globalement admise de personnalités qui interpellent et qui annoncent un avenir assez rarement rose.

Si le prophète de l’Eternel est perçu comme un déclinologue pour son temps, c’est parce que le caractère-même du ministère l’y conduit : on peut considérer en effet que le message prophétique le plus connu de tous (en relation avec la marche du monde), contenu dans le livre de l’Apocalypse, est une sorte d’inventaire d’évènements dramatiques se succédant à une cadence de plus en plus rapprochée, comme les douleurs d’une femme qui accouche, jusqu’à l’annonce de la fin-même du monde. On pouvait difficilement imaginer pire dans la veine du déclinisme. Au point que le sens-même du mot “apocalypse” en a été changé dans l’inconscient collectif [3].

La confusion entre la vision prophétique et la vision catastrophiste

Il existe cependant une vision négative du monde et de son avancement, qui n’a aucun lien avec la vérité. Elle est exprimée par des analystes — amateurs ou professionnels — qui ne se fondent pas sur la révélation biblique et qui prennent la parole publiquement en cultivant plus ou moins consciemment un discours catastrophiste. Sans vision spirituelle, ils ne sont que des instruments d’activation de peurs diverses (les leurs, en premier), et participent à entretenir un climat anxiogène.

Le catastrophiste évolue à la surface des choses et fixe les regards sur le visible immédiat, sur les conséquences dramatiques qui peuvent en découler, tandis que le prophète se fonde sur leur origine spirituelle et sur leur adéquation avec le plan divin. La phrase citée en introduction définit le déclinologue comme “une personne qui entretient une vision pessimiste de la situation économique, politique, ou encore culturelle …”. Le prophète se place dans une perspective spirituelle : c’est elle qui est le centre de gravité de son analyse et alimente sa vision. C’est pourquoi la vraie compréhension prophétique peut souvent prendre complètement à contre-pied les analyses qui ne se fondent que sur l’observation du visible et les spéculations qu’on peut en tirer.

Les temps de la fin sont-ils des temps de déclin ?

Que dit la Bible ? Le contexte de la fin des temps nous est décrit comme difficile[4], agité et dégradé, Jésus lui-même se demandant si la foi véritable existerait encore au moment de son retour[5]. Les prophéties révèlent une sphère chrétienne atteinte par le cancer de l’apostasie[6] (un recul de la foi véritable pouvant mener à son abandon en profondeur, mais pas en apparence[7]) et un monde opposé ouvertement à Dieu[8].

L’installation de cet état généralisé s’effectue graduellement, pour parvenir un jour à une conjonction de situations de plus en plus inextricable. Il paraît donc difficilement contestable que les temps de la fin (et leur préparation) sont des temps de déclin, pour ceux qui sondent les Écritures. Mais il existe malheureusement une frange importante du christianisme qui conteste cette vision de la fin, et qui n’admet pas que le monde soit entré dans cette phase.

Cet état de fait a été prophétisé, lui aussi. Par amour pour le siècle présent[9], et par une conception erronée de la vie chrétienne, certains croyants contesteront le message de préparation des enfants de Dieu, glissant même vers un contestation de certains points fondamentaux  :

“Car il viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine; mais, ayant la démangeaison d’entendre des choses agréables, ils se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs, détourneront l’oreille de la vérité, et se tourneront vers les fables” (2 Timothée 4/3).

« sachant avant tout que, dans les derniers jours, il viendra des moqueurs avec leurs railleries, marchant selon leurs propres convoitises, et disant: Où est la promesse de son avènement ? » (2 Pierre 3/3)[10]

Il est donc important de réfléchir au contexte spirituel dans lequel nous vivons, et de ne pas participer à ces mauvais raisonnements, mais au contraire de chercher à être “renouvelés dans l’esprit de notre intelligence” (Ephésiens 4/23), pour pouvoir nous inscrire dans un service véritable, inspiré et fidèle.

Écouter, sélectionner la source, et écouter …

Comme à d’autres périodes de l’Histoire, mais sans doute plus que jamais, notre époque est le théâtre d’une confusion destinée à décrédibiliser le message prophétique[11], qui sera l’objet d’attaques incessantes pour tenter de réduire son impact et son influence.

Pourquoi devons-nous particulièrement veiller dans cette période ? Parce que la Bible dit que le diable sait qu’il a peu de temps[12], et que fort logiquement, une action extérieure va être imprimée sur la société des hommes.

Pour prendre une image connue, il sera demandé aux hommes de fabriquer davantage de briques avec moins de paille. La vie professionnelle des sociétés industrialisées est désormais clairement frappée par cette loi : travailler davantage, pour avoir l’illusion de maintenir une qualité de vie qui, en réalité, se dégrade sans cesse. Et le moment choisi pour faire augmenter cette tension dans le monde est soigneusement choisi : le prétexte “visible” invoqué est celui des incertitudes et des crises économiques menaçantes, mais la réalité invisible est autre, et concerne l’approche de l’arrivée du Libérateur, le retour du Roi.

Dans cette période extrêmement importante, Dieu fait entendre son message prophétique mais il est une voix au milieu des autres voix : déclinologues, augures, spéculateurs, devins, analystes, faux prophètes. Nous avons besoin de discernement et d’une plus grande proximité personnelle avec le cœur de Dieu, Christ, pour reconnaître Sa voix. La rumeur des voix “prophétiques” peut s’élever et faire beaucoup de bruit, cherchant à provoquer des inquiétudes, des angoisses, et à pousser le peuple de Dieu à des actions charnelles et inconsidérées (présentées comme spirituelles). Il ne faut pas les écouter.

La voix de l’Esprit n’est pas inquiétante et ne crée pas de peurs, mais elle entraîne il est vrai dans une crainte de l’Eternel profonde, grave, sérieuse, qui génère de notre part de profondes modifications de vision et de comportement personnel, vis-à-vis de notre Dieu.

“… Et avant l’Eternel, il y eut un vent fort et violent qui déchirait les montagnes et brisait les rochers: l’Eternel n’était pas dans le vent.

Et après le vent, ce fut un tremblement de terre: l’Eternel n’était pas dans le tremblement de terre.

Et après le tremblement de terre, un feu: l’Eternel n’était pas dans le feu.

Et après le feu, un murmure doux et subtil”. (1 Rois 19/11)

Jérôme Prekel

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[1] C’est seulement en Jésus-Christ que cette force est anéantie et qu’une parfaite réconciliation avec le Père est opérée et accomplie en perfection.

[2] Le message prophétique est souvent présenté par l’expression “oracle de l’Eternel”, qui vient d’un mot hébreu qui signifie “fardeau, charge” (massa). Le fardeau est parfois porté par le prophète, et parfois par ceux qui reçoivent le message (voir Jérémie 23).

[3] Étymologiquement, le mot « apocalypse » est la transcription d’un terme grec (ἀποκάλυψις / apokalupsis) signifiant mise à nu, enlèvement du voile ou révélation.

[4] 2 Timothée 3/1 : “Sache que, dans les derniers jours, il y aura des temps difficiles”.

[5] Luc 18/8 : “Mais, quand le Fils de l’homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ?”

[6] 1 Timothée 4/1 : “Mais l’Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, quelques-uns abandonneront la foi, pour s’attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines de démons, par l’hypocrisie de faux docteurs portant la marque de la flétrissure dans leur propre conscience”, 2 Thessaloniciens 2/3 : “Que personne ne vous séduise d’aucune manière; car il faut que l’apostasie soit arrivée auparavant, et qu’on ait vu paraître l’homme du péché, le fils de la perdition”.

[7] 2 Timothée 3/5 : “ayant l’apparence de la piété, mais reniant ce qui en fait la force”, Matthieu 24/12 : “et parce que l’iniquité prévaudra, l’amour de plusieurs sera refroidi”.

[8] 2 Pierre 3/3 : “sachant avant tout que, dans les derniers jours, il viendra des moqueurs avec leurs railleries, marchant selon leurs propres convoitises, et disant: Où est la promesse de son avènement? Car, depuis que les pères sont morts, tout demeure comme dès le commencement de la création”, 2 Timothée 3/2 : “Car les hommes seront égoïstes, amis de l’argent, fanfarons, hautains, blasphémateurs, rebelles à leurs parents, ingrats, irréligieux (sans piété), insensibles, déloyaux, calomniateurs, intempérants, cruels, ennemis des gens de bien, traîtres, emportés, enflés d’orgueil, aimant le plaisir plus que Dieu”

[9] 2 Timothée 4/10 : “Démas m’a abandonné, par amour pour le siècle présent, et il est parti pour Thessalonique”

[10] À rapprocher de Jude 1/18 : “(les apôtres) vous disaient qu’au dernier temps il y aurait des moqueurs, marchant selon leurs convoitises impies; ce sont ceux qui provoquent des divisions, hommes sensuels, n’ayant pas l’esprit », décrivant une catégorie de croyants religieux, mais non spirituels. Voir aussi 1 Timothée 4/1 : « Mais l’Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, quelques-uns abandonneront la foi, pour s’attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines de démons, par l’hypocrisie de faux docteurs portant la marque de la flétrissure dans leur propre conscience… »

[11] celui qui décrit l’état véritable du monde, son destin, et le retour du Roi des rois et du Seigneur des seigneurs.

[12] Apocalypse 12/12 : “C’est pourquoi réjouissez-vous, cieux, et vous qui habitez dans les cieux. Malheur à la terre et à la mer! car le diable est descendu vers vous, animé d’une grande colère, sachant qu’il a peu de temps”.

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