Ne dis pas: D’où vient que les jours passés étaient meilleurs que ceux ci? Car ce n’est point par sagesse que tu demandes cela (Ecc 7:10).
Cette pensée de l’Ecclésiaste est importante car elle met en lumière une attitude assez répandue, qui consiste à nourrir une certaine forme de nostalgie du passé, dans une sorte d’attitude plus ou moins consciente. D’une manière plus prosaïque, l’Ecclésiaste nous dit qu’il sera difficile d’avancer … en regardant en arrière : reculer vers l’avenir rend les progrès difficiles ! Il vaut donc mieux avoir le présent plein d’avenir, que l’avenir plein de passé…
C’est par conséquent un très bon message qui est contenu dans cette parole de l’Ecclésiaste. “Souvenez-vous de la femme de Lot” (Luc 17/32), rappelle Jésus à ses disciples : ceux qui regardent en arrière finissent toujours par s’arrêter[1] et se cristaliser à cause d’un lien trop fort avec le passé.
Dieu a un chemin pour ses enfants, sur lequel Il leur demande d’avancer : ce n’est pas un chemin facile[2], mais c’est un chemin bénissant, même lorsqu’on y trébuche ou qu’on y tombe. Parce qu’on s’y relève, et on y est relevé. C’est un chemin — un devenir — qui comporte en lui-même sa propre mesure de protection :
“Il y aura là un chemin frayé, une route, Qu’on appellera la voie sainte; Nul impur n’y passera; elle sera pour eux seuls; Ceux qui la suivront, même les insensés, ne pourront s’égarer” (Ésaïe 35:8).
La Parole de Dieu affirme que “le sentier des justes est comme la lumière resplendissante qui va croissant, jusqu’à ce que le plein jour soit établi ! [3]” : quelle vision pour les rachetés ! Ceux dont la boussole intérieure marque le “nord” spirituel seront gardés, car ils sont tournés vers la bonne direction, quand bien même il faudrait affronter le doute, la peur, les déserts, les luttes, ou encore passer par la vallée de l’ombre de la mort[4]. Pour eux, il n’est pas question de dire ou de penser “que les jours d’autrefois étaient meilleurs que le présent”, ou même l’avenir. Parce qu’ils marchent chaque jour pour devenir des enfants de Dieu complets, jusqu’à ce que Christ soit formé dans leurs cœurs[5].
Mais il y a néanmoins un domaine dans lequel cette pensée de l’Ecclésiaste ne peut s’appliquer, c’est celui de la compréhension de l’état spirituel du monde et des hommes qui s’y trouvent, dans une perspective prophétique. Car de ce point de vue, le déclin général est malheureusement avéré.
Il est intéressant de penser que du temps du roi Achab, par exemple, on était fondé à penser que les jours anciens — ceux des rois David et Salomon — étaient meilleurs. Car on était entré dans une ère abominable où la foi dans le vrai Dieu était mise à mal.
De même, après que Jérémie ait vu la prise de Jérusalem et le pillage du temple, on était fondé à penser que les jours passés étaient meilleurs que ceux-là, car on était entré dans une époque de captivité et d’humiliation. Et on pourrait multiplier les exemples, à différents niveaux de l’Histoire de la création, jusqu’à même plonger nos regards dans la vision prophétique de la fin des temps, dans l’avenir. Cela nous amènerait à constater que les effets du drame de la Chute continuent de se développer, comme les répliques régulières d’un interminable séisme, tout au long de l’Histoire de l’humanité, jusqu’au terme déterminé.
C’est pourquoi nous pouvons penser et affirmer, à la lumière de l’ensemble des Écritures, que depuis la Chute produite en Eden, l’humanité et la création toute entière sont entrées dans un crépuscule spirituel, qui entraînera une nuit de plus en plus épaisse, jusqu’à l’apparition de l’impie, l’homme de péché, que le Seigneur anéantira par le souffle de sa bouche[6].
Cette pensée de l’Ecclésiaste, qui relève d’une considération particulière, ne peut donc pas être appliquée sur toutes les choses de la vie, comme un axiome incontestable.
Elle nous enseigne davantage que le négativisme (et le positivisme) ne sont en définitive que les deux pôles de la subjectivité, et que Dieu nous appelle à regarder à Lui.
Ce que l’Esprit de Dieu cherche à établir dans le cœur de Ses enfants, c’est un gouvernement par la foi et l’espérance en Lui, Son amour et sa justice, et non une oscillation de notre âme entre optimisme et pessimisme.
Jérôme Prekel
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[1] Genèse 19:26 : “La femme de Lot regarda en arrière, et elle devint une statue de sel”.
[2] Matthieu 7/14 : “Mais étroite est la porte, resserré le chemin qui mènent à la vie, et il y en a peu qui les trouvent”.
[3] Proverbes 4/18
[4] Psaume 23/4
[5] Galates 4/19 : “Mes enfants, pour qui j’éprouve de nouveau les douleurs de l’enfantement, jusqu’à ce que Christ soit formé en vous”.
[6] 2 Thessalonniciens 2/8 : “Et alors paraîtra l’impie, que le Seigneur Jésus détruira par le souffle de sa bouche, et qu’il anéantira par l’éclat de son avènement”.