Les prédicateurs rendent des chaires célèbres; les prophètes rendent des prisons célèbres

par Leonard Ravenhill [1]

L’homme dont la courte prédication se limite à dire: « Repentez-vous », va à contre-courant de son siècle et, il se verra persécuté sans pitié par cette génération dont il défie la moralité. Une seule issue attend un tel homme, « qu’on lui coupe la tête ! » Mieux vaut pour vous ne pas essayer de prêcher la repentance, tant que vous n’aurez pas recommandé votre tête au ciel. Joseph Parker[2]

Nous devons interpréter correctement la Parole de vérité. Le verset: « Voici, je me tiens à la porte et je frappe » (Apocalypse 3;20) ne fait pas allusion à des pécheurs, ou à un Sauveur qui attend à la porte. Non ! Il présente l’image tragique de notre Seigneur à la porte de sa propre église de Laodicée qui s’efforce d’entrer. Est-ce concevable ? Dans la majorité des réunions de prière, un autre verset revient tel un leitmotiv: « Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux ». Mais trop souvent, Il n’est pas au milieu; Il est devant la porte ! Nous chantons ses louanges, mais nous fuyons sa personne !

Je ne m’émerveille plus autant de la patience dont fait preuve le Seigneur envers les pécheurs au coeur de pierre de notre époque. Après tout, ne ferions-nous pas preuve de patience à l’égard d’un homme qui serait à la fois aveugle et sourd ? Cela correspond à l’état des pécheurs. Cependant, je m’émerveille de la patience du Seigneur envers l’Eglise assoupie, léthargique et égoïste ! Une Eglise prodigue dans un monde prodigue, voilà le véritable problème de Dieu.

Fausses croyances

Quels croyants en faillite, aveugles et prétentieux nous sommes ! Nous sommes nus et nous ne le savons pas. Nous sommes riches (nous n’avons jamais possédé autant de biens matériels), mais nous sommes pauvres (nous n’avons jamais eu moins d’onction) ! Nous n’avons besoin de rien, et pourtant nous manquons de presque tout ce que possédait l’Eglise apostolique. Peut-Il se tenir « au milieu de nous » alors que nous nous exhibons sans honte dans notre nudité spirituelle ?

Le feu de l’Esprit

Oui, nous avons besoin du feu ! Où est la puissance du Saint-Esprit qui foudroie les pécheurs et remplit les autels ? Aujourd’hui, nous semblons nous intéresser d’avantage à l’air conditionné dans les églises qu’à la qualité de nos prières. « Notre Dieu est aussi un feu dévorant » (Hébreux 12/29). Dieu et le feu sont inséparables; c’est aussi vrai des hommes et du feu. Chacun de nous foule en cet instant un chemin de feu – le feu de l’enfer pour le pécheur, le feu du jugement pour le croyant ! Puisque l’Eglise a perdu le feu du Saint-Esprit, des millions d’êtres se dirigent vers le feu de l’enfer.

Le prophète Moïse a reçu son appel par le feu. Elie fit descendre le feu. Elisée alluma un feu. Michée annonça le feu, Jean-Baptiste s’écria: « Il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu ». Jésus déclara: « Je suis venu jeter un feu sur la terre ». Si nous redoutions autant de manquer le baptême de feu que nous redoutons de manquer le baptême d’eau, nous aurions une église ardente et une autre Pentecôte. Le « vieil homme » peut résister au baptême d’eau, mais le baptême de feu le détruit, car Il « brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint point » (Matthieu 3;12). Tant que le feu ne vint pas les purifier, les disciples qui faisaient des miracles et qui contemplèrent la gloire de sa résurrection, ne purent prêcher à propos de la croix.

Un manque de prédicateurs prophétiques

Par quelle autorité certains hommes prêchent-ils Dieu aujourd’hui, dans leur pays ou au-delà des mers, alors qu’ils n’ont pas fait l’expérience de la « chambre haute »? Nous ne manquons pas de prédicateurs sur la prophétie, mais nous connaissons un manque navrant de prédicateurs prophétiques. Nous ne réclamons pas des hommes qui vont faire des prédictions spirituelles ou des pronostics à sensation. Il ne reste pas beaucoup de place pour la prédiction, car nous avons le Livre, et la pensée du Seigneur s’y trouve dévoilée. Mais nous avons besoin d’hommes qui proclament. Nul homme ne peut monopoliser le Saint-Esprit, mais le Saint-Esprit peut monopoliser des hommes. Les prophètes appartiennent à cette catégorie. On ne les attend pas; rien ni personne ne les annonce, ni ne les présente – ils arrivent simplement. Ils sont envoyés, scellés et sensationnels. Jean-Baptiste « n’a fait aucun miracle », c’est-à-dire qu’une foule d’hommes abandonnés ne s’est pas jetée sur lui pour qu’il les guérisse ou qu’il les touche. Néanmoins, il réveilla une nation spirituellement morte ! 

Les vrais prophètes ne sont jamais loin du martyre

Frères, à la lumière du « trône du jugement », mieux vaudrait vivre six mois avec un coeur volcanique, à dénoncer le péché chez les grands et les petits de ce monde, et à séparer notre nation de la puissance de Satan pour qu’elle se tourne vers celle de Dieu (à l’instar de Jean-Baptiste), que mourir avec tous les honneurs ecclésiastiques et les diplômes théologiques, mais en étant la risée de l’enfer et des nullités spirituelles.

Brocarder les empereurs de l’alcool et maudire les politiciens corrompus ne nous attire pas de châtiments. Nous pouvons très bien agir ainsi et conserver notre tête et notre chaire. Mais les prophètes subirent le martyre parce qu’ils dénoncèrent les fausses religions en termes très clairs. Et, quand nous aussi, nous voyons des « religions mensongères » tromper les hommes dans la vie et nous voler des bien-aimés dans la mort, ou quand nous observons des prêtres les conduire en enfer, un crucifix en guise de bannière, nous devrions nous enflammer d’une sainte colère contre eux. Plus tard, peut-être, pour ouvrir la voie à une Réforme du vingtième siècle, brûlerons-nous sur des bûchers de martyrs.

« O Dieu, envoie-nous une prédication prophétique qui sonde les coeurs et qui brûle à vif ! Envoie-nous une race de prédicateurs-martyrs, des hommes avec un fardeau, courbés, ployés et brisés sous la vision du jugement imminent et du sort des impénitents dans un enfer sans fin ! »

Les vrais prophètes rendent les prisons célèbres

Les prédicateurs rendent des chaires célèbres; les prophètes rendent des prisons célèbres. Que le Seigneur nous envoie des prophètes, des hommes effrayants qui parlent haut et fort et qui n’épargnent personne, qui répandent sur les nations des malheurs dictés par l’onction, des hommes trop bouillants pour se contenir, trop durs à entendre, trop impitoyables pour épargner. Nous sommes lassés de ces hommes aux vêtements élégants, aux discours mielleux, qui déversent des fleuves de paroles avec une seule goutte d’onction. Ils s’intéressent davantage à la compétition qu’à la consécration, à la promotion qu’à la prière. Ils confondent propagande et propagation, et se soucient davantage du bonheur de leur église que de sa sainteté !

Comparés à l’Eglise néo-testamentaire, combien nous sommes en-dessous des normes apostoliques ! Une doctrine solide a plongé la plupart des croyants dans un sommeil profond, car la lettre ne suffit pas. Elle doit prendre feu ! Pour « procurer la vie », l’Esprit doit venir s’ajouter à la lettre. Une prédication correcte, grammaticalement parfaite, et sans la moindre erreur d’interprétation peut s’avérer aussi insipide qu’une bouchée de sable. Pour dépouiller Rome et pour paralyser le communisme, nous avons besoin d’une Eglise baptisée de feu. Un buisson ardent conduisit Moïse; une Eglise en flammes attirera le monde, et du milieu d’elle, ils entendront la voix du Dieu vivant ».

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[1] (1907-1994) évangéliste évangélique anglais, qui a émigré aux Etats Unis dans les années 50 et qui a exercé son ministère sous tente à partir des années 60. Plusieurs se réclament de son influence : Tommy Tenney, David Wilkerson et Paul Washer. Était un ami proche de A.W. Tozer, qui a dit de lui : « Pour de tels hommes, l’église a une dette trop lourde à payer. Ce qui est curieux, c’est qu’elle essaie rarement de le rétribuer tant qu’il vit. La génération suivante construit plutôt son sépulcre et écrit sa biographie; comme si elle voulait instinctivement et maladroitement s’acquitter d’une obligation largement ignorée par la génération précédente ».

[2] (9 April 1830 – 28 November 1902) prédicateur congrégationaliste anglais, contemporain de Charles Spurgeon, qui le tenait en haute estime.

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