Brandon Lake, star de la louange américaine, critique les chants d’adoration de l’église pour leur langage trop « chrétien » 

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Brandon Lake est pasteur de l’église Seacoast, une méga-église multisite non confessionnelle de 14 000 membres en Caroline du Sud.

Ancien membre de Bethel Music et de Maverick City Music, il est également un auteur-compositeur-interprète talentueux dont la musique lui a valu de nombreux éloges et récompenses, notamment 10 nominations aux Grammy Awards (et cinq victoires), près de 40 nominations aux Dove Awards (et 10 victoires), ainsi qu’une multitude de Billboard Music Awards et d’ASCAP Christian Music Awards. Ses chansons les plus connues sont « Gratitude », « That’s Who I Praise », « Graves into Gardens », « Praise You Anywhere », « This is a Move » et « Rattle ». Il a également sorti « Hard Fought Hallelujah », une chanson de type adoration qu’il a co-écrite avec Steven Furtick et Chris Brown d’Elevation Worship.

Le 28 avril dernier, lors d’une récente apparition sur le Podcast de Bryce Crawford, Brandon Lake affirme que les églises chantent des chansons avec trop de langage « chrétien » comme « Holy Holy Holy is the Lord God Almighty » (Saint Saint Saint est le Seigneur Dieu tout-puissant). « J’aimerais voir plus de groupes de louange, plus d’églises, garder « Bubba » à l’esprit. « Bubba », c’est le gars qui est au fond de la salle et qui a été traîné là par sa femme. Et si votre chanson d’ouverture ou la plupart de vos chansons contiennent tellement de langage chrétien, il va se demander « est-ce que je peux chanter ce genre de truc ? Parce que moi, je n’en suis pas encore là ».

Parce que quand il entend « Saint, Saint, Saint est le Seigneur Dieu Tout-Puissant », je pense qu’il se dit : « Qu’est-ce que ça veut dire “saint” ? Je n’en sais rien. Alors il faut peut-être donner à Bubba un langage musical compréhensible. Pour qu’il puisse dire : « ok, je me retrouve dans cette chanson. Je me sens comme ça », tu vois ? Et j’espère que c’est ce que ma musique peut continuer à faire ».

Commentaire du Sarment

Brandon Lake a-t-il raison de désirer que les incrédules soient touchés pendant le culte (ou des concerts d’adoration) ? La réponse est oui. A-t-il raison de chercher des moyens pour les atteindre ? La réponse est oui encore. A-t-il raison de chercher à influencer l’Église pour qu’elle adapte le culte aux incroyants ? La réponse est « oui » pour les chrétiens pragmatiques (pragmatisme : attitude d’une personne qui ne se soucie que d’efficacité), et « non » pour les fondamentalistes. Mais il faut reconnaître que dans ce type de courant évangélique progressiste, qui veut (comme son nom l’indique) que le christianisme évolue, une part du chemin a déjà été faite, en adaptant la musique chrétienne aux critères du Monde, de sorte qu’on ne voit plus de différence … sauf justement dans les paroles des chants ! Il n’est donc pas étonnant que nous entrions dans la phase 2, en suggérant de modérer les contenus, après avoir relooké le contenant. 

Les inconvertis ne comprennent pas ce qu’ils chantent ? Je crois que c’est faux. On a plutôt peur qu’ils s’effarouchent devant des prières ou des louanges trop passionnées. Ont-ils l’impression de ne pas parler la même langue ? C’est bon signe, et c’est le contraire qui serait inquiétant. L’Assemblée doit être un espace autre, un royaume différent, qui ne fait rien pour favoriser le tourisme religieux. Et on devra en apprendre la langue qui est nouvelle. Et on devra prendre la Croix qui s’inscrit à contre-courant de la culture séculière, parce que la conversion, c’est une réforme qui descend dans les profondeurs.

Si cette interview, un peu provoquante, existe, c’est pour faire passer un message. Lequel ? C’est simple : ce sont nos cultes qui sont trop chrétiens, pas seulement notre musique ou notre adoration. Un jour on nous dira (et il est déjà venu) que ce sont nos messages qui ont besoin d’être simplifiés (et raccourcis). Tout ça pour nous entendre dire, dans la continuité, que c’est notre christianisme qui est trop chrétien.

8 comments On Brandon Lake, star de la louange américaine, critique les chants d’adoration de l’église pour leur langage trop « chrétien » 

  • Bonjour
    Je me demande si dans la Bible, on voit Dieu se servir de la musique pour toucher des incrédules… ?
    Du temps des apôtres, la musique et les arts en général étaient pourtant bien présents (le théâtre par exemple). Pourquoi ne les voit-on pas utiliser ces moyens pour évangéliser ?
    Je me demande si ces moyens, très à la mode dans les milieux chrétiens actuels, sont réellement validés et encouragés par Dieu dans le but de « toucher des gens »…
    Parfois j’ai l’impression que l’on s’empresse d’utiliser des dons (de chant, de musique, de dessin…) pour évangéliser mais sans prendre le temps d’en parler à Dieu au préalable.
    Je vois deux gros pièges principaux résultants de cette attitude volontariste : toucher les gens par le biais des émotions et non de la Parole, et la glorification personnelle de l’artiste (comme Brandon Lake qui parle de « SA » musique qui touche les gens…).

    • Bonjour Jeanne
      Merci pour la réflexion.
      Dans la Bible il y a un exemple d’association de musique avec l’onction, lorsque le prophète Elisée demande un joueur de harpe et « la main de l’Eternel fut sur ELisée » (2 Rois 3/15). On imagine que ce n’était pas de la musique profane ! Il y aurait sans doute bien des choses à dire de ce petit épisode, que certains ont érigé en principe dans certains milieux charismatiques. Dans la même veine, on a extrapolé beaucoup de choses à partir de l’organisation de la louange et de l’adoration par David. Il n’est pas étonnant qu’on en fasse aujourd’hui un usage abondant, quels que soient les courants, avec les moyens que vous dénoncez avec raison. Votre conclusion est tout à fait vraie. On pourrait ajouter que lorsque plus rien ne différencie une star de la pop-rock culture, d’un serviteur de Dieu, c’est que l’empreinte du Monde et de ses valeurs est devenue plus forte que l’Esprit de séparation (le sens de la sainteté) de ce même Monde, puisqu’il est acquis que pour mieux parler au Monde, il faut le faire avec ses codes, sa musique et son langage.

      • Michael Tait, ancien leader des groupes de rock évangélique DC Talk et Newsboys, accusé d’avoir agressé sexuellement plusieurs jeunes hommes :
        DC Talk est un groupe de rock chrétien évangélique américain, multi-récompensé, et considéré par les critiques comme rien de moins que les Beatles de la musique chrétienne ».
        Une longue enquête d’une journaliste, Jessica Morris et les témoignages d’une cinquantaine de victimes ont poussé Tait à se retirer, après avoir reconnu devant ses amis avoir mené une double vie.

        Le 3 janvier 2020, Il faisait partie des personnalités évangéliques qui ont prié sur scène pour le président Donald Trump avec notamment Paula White-Cain, le pasteur Jentezen Franklin à l’église King Jesus International Ministry à Miami, en Floride.
        Michel Tait

      • Tout à fait d’accord avec vos propos, Jérôme. Merci pour votre réponse 🙂
        J’avoue que je ne perçois pas encore toute la portée de la musique dans ma marche avec le Seigneur. Mais je peux voir au travers de la Parole et ce que je vis, qu’elle occupe une place sérieuse, puissante, sacrée, tout d’abord, et surtout, au sein du Corps de Christ.
        Je l’ai réalisé pleinement il y a quelque temps seulement. Alors qu’avant ma conversion, je collectionnais de façon compulsive les titres musicaux en tout genre, lorsque j’ai rencontré le Seigneur, je ne pouvais plus du tout écouter de musique.
        Mais peu de temps après ma conversion, je me suis en quelque sorte forcée à rechercher des morceaux de musique chrétienne, car j’entendais ici et là qu’une véritable marche avec Dieu ne pouvait se faire sans. Et je voyais bien que dans la Bible, la musique était souvent évoquée.
        J’ai rapidement trouvé quelques titres à mon goût sur internet, et je revenais les écouter régulièrement. Mais j’ai senti peu à peu que mon intérêt était davantage porté sur les mélodies, sur la facilité à chanter moi-même les paroles, sur ma propre voix que je cherchais à être le plus juste possible, etc. Bref, mon coeur n’était pas vraiment tourné vers Dieu…
        J’ai donc laissé de côté tout ça, sentant que mes travers d’avant n’étaient pas loin de revenir, et j’ai prié. J’ai demandé au Seigneur de me montrer l’intérêt réel des louanges, des chants, des psaumes, car j’avais l’impression de manquer quelque chose.
        Quelques semaines plus tard, Dieu me répondit : alors que je me trouvais dans une période difficile, qui me semblait sans issue et qui me paralysait, je suis tombée « par hasard » sur un cantique qui, en l’espace de 3 minutes a répondu à tous mes questionnements du moment.
        J’ai eu la nette sensation que Dieu me parlait au travers du texte de ce chant.
        C’était un cantique au style désuet, que j’avais du mal à chanter et qui était posté sur Youtube à la manière d’un karakoé, avec en fond une image digne d’un calendrier des PTT… Rien d’attirant en somme, un morceau que je n’aurais même pas daigné écouter il y a quelques années, et pourtant, quelle puissance…
        Pour l’instant donc, je considère la musique au sein de l’Eglise comme faisant partie intégrante de notre fortification et notre édification. Et j’ai bien l’impression que c’est son tout premier rôle.
        Je sais « intellectuellement » que la louange et l’adoration chantées ou accompagnées de musique, ont une portée tout aussi cruciale, mais je n’ai pas encore eu l’occasion de la vivre…

        • Merci Jeannne pour ce témoignage, de quelqu’un qui continue de s’interroger et de chercher. Je crois qu’on peut dire que pour un chrétien de notre époque, le contact avec la louange et l’expérience personnelle est inévitable, tant la chose a rempli un grand espace. Et il n’est pas facile de mener une réflexion approfondie sur le sujet. c’est ce que j’ai essayé de faire avec cette étude que je cite régulièrement : https://lesarment.com/2007/01/pieges-autour-de-la-musique-chretienne/

          Dans mon expérience personnelle, j’ai découvert que je ne pouvais pas me passer des chants, cantiques, louange et adoration. C’est une part qui m’est totalement indispensable, et comme vous, je remarque avec les années que l’Esprit cherche à la purifier. J’ai eu la chance d’avoir un premier contact très dépouillé, au début de ma conversion, et on va dire qu’il n’était pas possible d’être séduit par le côté instrumental^^. Puis j’ai connu l’évolution de la musique chrétienne, sa popularisation, pour ne pas dire peopolisation. Mais j’ai continué ma pratique personnelle, qui s’est enrichie et qui m’a, comme vous, reconnecté avec mes passions musicales anciennes. Et j’ai dû revenir à l’essentiel moi aussi, et écarter de nouveau toute la cosmétique musicale qui plaît tellement à l’âme. Reprendre mes distances.

          Un des plus beaux versets de la louange que j’affectionne est dans le livre de Job : « Et on ne dit pas: Où est Dieu, mon créateur, qui donne des chants de joie dans la nuit … ». Les chants dans la nuit, quelle image ! c’est-à-dire un cœur qui chante tandis que le cerveau ne chante pas, et que le corps se plaint. Un cœur qui chante, c’est un vrai sujet d’étonnement.

          • Merci Jérôme pour votre témoignage !
            Je lis et relis régulièrement cette étude que vous citez sur les pièges autour de la musique chrétienne. Elle est précieuse et les commentaires qui la suivent sont tout aussi enrichissants.
            Merci également pour la fin de votre message qui m’a permis de mettre encore un peu plus en lumière ce que j’avais expérimenté pendant cette période difficile : un coeur qui chante alors que tout le reste de l’être se plaint….

  • « Le culte n’est pas une piste de décollage pour les sceptiques spirituels. C’est une salle du trône. Si « Bubba » ne comprend pas le chant « Saint, Saint, Saint », c’est normal … et s’il est désorienté dans ce culte, c’est très bien. Cela signifie qu’il est enfin dans un endroit qui ne tourne pas autour de lui. Nous ne sommes pas appelés à rassurer l’incrédulité avec des paroles accessibles, nous sommes appelés à élever les cœurs vers celui qui est digne, que « Bubba » y parvienne ou non ». Stephen DeCesare

  • Pour faire court: Le monde est anthropocentrique…Le royaume de Dieu est christocentrique
    La différence est très grande

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