Réflexion à propos de l’acte d’édition chrétien

Aujourd’hui, internet a bouleversé une grande partie du paysage de l’édition populaire. L’émergence des blogs permet à chacun de se  » publier « , de s’exposer, de témoigner de ses expériences, de commenter l’actualité, d’enseigner.
Un site internet d’enseignement chrétien est, DE FAIT, dans un rôle d’édition et fonctionne comme une banque de ressources spirituelles. C’est la forme moderne d’une maison d’édition, qui publie (ici, qui met en ligne) des livres, extraits, articles, études, etc.

Avant qu’internet existe, lorsqu’un éditeur souhaitait publier, il lui fallait investir. Le temps de la réflexion, l’exercice du discernement, le provisionnement de l’impression, de la diffusion, constituaient les paramètres qui l’amenaient (ou pas) au choix d’éditer. Aujourd’hui, les éditeurs d’enseignements chrétiens sur le Net ne fonctionnent pas de la même manière. La perception du risque est allégée et l’engagement est donc moins exigeant : c’est la bonne recette pour que la superficialité se glisse dans l’édition de l’enseignement de la Vérité. On lit une chose, elle nous convient : nous la diffusons. Un simple clic suffit. Si un éditeur du Net devait assumer financièrement ses choix éditoriaux, il y aurait beaucoup moins d’enseignements approximatifs aujourd’hui.

Un second paramètre est constitué par le fait que les personnes qui gèrent des sites diffusant des enseignements chrétiens ne sont pas toujours qualifiées spirituellement. Et nous connaissons l’impact négatif d’une personne qui n’est pas à sa place. L’enseignement est un don de l’Esprit (docteur) et on confond souvent ce qui nous plaît, ce qui correspond à nos conceptions, avec la Vérité. On confond ce que nous avons reçu, avec le don de Dieu. Le problème ne date pas d’aujourd’hui, mais les grandes possibilités de diffusion donnent au phénomène une ampleur sans précédent. La prédication des expériences personnelles et le montage en épingle de fragments de la Vérité, ou du plan de Dieu, battent leur plein comme jamais.

Un troisième paramètre, découlant du précédent, s’ajoute encore : dans bien des cas, les sites ou blogs chrétiens qui mettent en ligne des enseignements chrétiens, des prophéties ou des témoignages sont gérés par un petit nombre de personnes, voire dans beaucoup de cas, par une seule personne. Ceux qui ne s’exercent pas à entretenir des relations de partenariat, d’échange et de soumission à d’autres autorités sont exposés au danger de ne suivre que leur volonté propre. Ils ne pourront pas l’éviter. Paradoxalement, ces chrétiens-éditeurs-enseignants sont souvent ceux qui dénoncent le plus activement les fonctionnements pyramidaux et babylonniens des dénominations diverses du christianisme ; sans s’en rendre compte, ils en souffrent eux-mêmes, mais la poutre est souvent invisible, comme chacun sait. En fait, le même modèle se duplique partout, tirant sa légitimité de la rébellion congénitale du coeur humain, tout simplement. Et le manque de la croix dans les vies amène aujourd’hui (et amènera demain) tout un pan de l’enseignement chrétien à passer entre les mains (et sous le contrôle) de l’Homme, de l’Humain, ce qui sera probablement un des plus grands drames du christianisme moderne, et un puissant levier d’apostasie.

On entend que certains responsables de sites chrétiens se défendent ainsi de diffuser des ressources approximatives ou incertaines : « nous ne sommes pas des docteurs, nous sommes des chrétiens au service des chrétiens. C’est aux gens de retenir ce qui est bon ». En dépit de la pertinence de l’emploi du verset biblique, j’aimerais montrer que cet argument est spécieux. Car si j’agis en tant que diffuseur d’enseignements, je suis, DE FAIT, un enseignant, et je tombe donc sous le coup de la responsabilité du ministère de l’enseignant : « Ne soyez pas beaucoup de docteurs, mes frères, sachant que nous en recevrons un jugement plus sévère » (Jacques 3:1).

En effet, un « chrétien au service de chrétiens » qui diffuse (en toute bonne foi) des enseignements à ses frères, s’inscrit (même à son corps défendant) dans le cadre du ministère de l’enseignement. Il adresse des ressources qu’il a estimées fiables et édifiantes à des dizaines, des centaines, des milliers de croyants, et nous savons que ces choses sont des semences. Elles pousseront des rejetons dans les coeurs et les pensées, soyons-en certains.

Le raisonnement qui consiste à se dédouaner de notre responsabilité, dans la chaîne de transmission de l’enseignement, ne doit tromper personne et surtout pas notre propre coeur. De même, on lit parfois que « la rédaction n’est pas forcément d’accord avec l’auteur sur l’ensemble de sa prise de position, etc », formule destinée à transférer la responsabilité sur le lecteur, sous des apparences vertueuses d’avertissement.

Ce principe peut effectivement avoir cours dans une revue mondaine – de quelque sujet que ce soit – mais n’a AUCUNE place dans un média chrétien d’enseignement de la Vérité. Car nous devons veiller à ne transmettre AUCUN virus spirituel, AUCUN mensonge, AUCUNE prophétie qui ne soit éprouvée, AUCUNE nourriture frelatée (1), AUCUN découpage biblique fallacieux (2) : car cela nous sera redemandé.

Le Sarment/J. Prekel
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(1) 2 Corinthiens 2:17 « Car nous ne sommes pas comme plusieurs, qui frelatent la parole de Dieu; mais comme avec sincérité, comme de la part de Dieu, devant Dieu, nous parlons en Christ ».
(2) 2 Timothée 2:15 « Etudie-toi à te présenter approuvé à Dieu, ouvrier qui n’a pas à avoir honte, exposant justement la parole de la vérité » (littéralement « découpant droit »).

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