« Avant que le réveil n’éclate, j’ai d’abord été 12 années missionnaire : je prêchais de tout mon cœur, alors que certains Pasteurs ne le faisaient pas, prétextant qu’il faut être prudent avec ce que l’on prêche, car les gens risquent de fuir l’église si on leur dit la vérité ; néanmoins je disais aux Zoulous : « convertissez-vous et changez de vie ; si vous ne le faites pas, vous êtes sur le chemin de l’enfer ». Mais ils me répondaient : nous avons entendu ce que tu dis, mais tu dois nous comprendre : le christianisme est la religion des Blancs, et nous avons la nôtre ; tu es chrétien parce que tes ancêtres étaient chrétiens, si tu étais né dans une famille zouloue, tu serais comme nous. Le christianisme est bon et nous avons beaucoup reçu de la civilisation occidentale, vous nous avez construit des églises, des écoles, mais cela ne nous suffit pas : nous voulons aussi conserver nos traditions, notre culte des ancêtres ».
…
J’ai essayé de leur expliquer que le culte des ancêtres était diabolique et que nous n’en avons pas besoin si nous avons Jésus ; cependant, à leur manière, ils m’ont fait comprendre que pour eux le christianisme était comme l’eau que l’on verse sur le feu : elle éteint bien les flammes, mais la braise reste ; voilà la raison pour laquelle ils voulaient rester attachés à leurs anciennes traditions, qui, d’après eux, va au fond des choses. C’est en vain que j’ai essayé de leur faire comprendre que Jésus suffit.
La recherche du réveil
Un jour j’ai prié avec ferveur : « Oh ! Seigneur, s’il te plaît, sois aujourd’hui avec moi pendant la prédication, accorde-moi la sagesse et la force de ton Saint Esprit, donne-moi ta Parole et ton autorité afin que je puisse convaincre ces Zoulous que tu n’es pas seulement le Dieu des Blancs, mais que tu es le fils de Dieu qui est mort pour tous, ressuscité et monté au ciel ». J’avais préparé avec soin mon sermon : j’ai commencé alors par l’Ancien Testament, par les prophéties concernant Jésus : Esaïe, qui a vécu 600 ans avant la naissance du Messie, avait prophétisé qu’il naîtrait d’une vierge. J’ai prêché aux Zoulous en leur expliquant comment toutes ces promesses de l’Ancien Testament se sont réalisées, comment Jésus est finalement mort sur la croix pour nos péchés, qu’il est ressuscité, afin que nous ayons la vie : « nous n’avons pas besoin d’adorer Mahomet : nous pouvons visiter le tombeau qui renferme ses os. Nous n’avons pas besoin de Bouddha : il est mort. Ce sont des idoles mortes, mais Jésus est un Dieu vivant : son tombeau est vide, parce qu’il est ressuscité, il est monté au ciel et tout pouvoir lui a été donné sur la terre et dans les cieux. Il n’y a aucun autre nom qui a été donné parmi les hommes, par lequel ils puissent être sauvés si ce n’est le nom de Jésus ; pour tous les êtres humains, quelle que soit la couleur de leur peau, il n’y a qu’un chemin : Jésus-Christ. Il est le chemin, la vérité et la vie, il ne change pas et reste toujours le même qu’il y a 2000 ans. Comme les gens sont allés vers lui en ce temps-là, nous pouvons nous aussi, aujourd’hui, venir à lui ».
Au pied du mur
J’avais à peine terminé ma prédication qu’une vieille dame vint vers moi :
« Pasteur, est-ce vrai ce que tu nous as dit ? »
« Oui », répondis-je.
« Ce Jésus, ce Dieu des Blanc, vit-il réellement ? Est-il vraiment comme tu nous l’a raconté ? »
« Oui ».
« Peux-tu lui parler ? »
« Bien sûr, tu peux aussi lui parler : nous appelons cela la prière, tout le monde peut prier. »
« Oh, dit-elle, je suis si contente d’avoir trouvé un homme qui sert un Dieu vivant : j’ai une fille adulte, qui est complètement folle, peux-tu demander à ton Dieu qu’il la guérisse ? »
Je ne savais quoi dire. Quel insensé étais-je ! J’avais pensé mettre ces gens au pied du mur, et maintenant c’est moi qui m’y trouvais ! Et je ne m’étais même pas préparé une porte de sortie ; comment allais-je me sortir de cette situation ? Je ne pouvais quand même pas prier Dieu de guérir cette fille ; qu’allait-il se passer ?
…
Je me retrouvais ainsi sans aucune ressource ; extérieurement j’étais resté tout à fait calme et je n’avais pas montré ma perplexité. Finalement je lui dis : « Où est ta fille ? Est-elle ici ? » Elle me répondit qu’elle était à la maison ; ce fut un soulagement pour moi : je disposais d’un peu de temps et certainement une pensée me viendrait ! Cette femme habitait à environ 1 km, on pouvait aller à mi-chemin en voiture, puis il fallait continuer à pied : « Bien ! Laisse-moi un peu de temps, je vais mettre les choses en ordre ici, puis je viendrai avec toi. »
Un cas de possession démoniaque désespéré
En chemin, elle m’expliquait qu’elle était veuve depuis quatre ans ; elle n’avait que cette fille, et un fils déjà marié qui travaillait à Durban. Quand nous sommes arrivés à l’endroit où elle habitait, j’ai jeté un regard dans la hutte, et je me suis écrié, effrayé : « Mais tu ne m’as pas raconté la moitié de ce que je vois ici ! ». La fille était assise au milieu de la hutte, attachée par les bras avec des fils de fer, qui avaient tellement meurtri sa chair que le sang coulait ; elle était couverte de plaies et de cicatrices, certaines guéries, d’autres plus récentes ; mais elle forçait tellement que les fils entaillaient profondément ses bras. Sans arrêt, elle parlait en des langues étrangères que l’on ne pouvait pas identifier. « Depuis combien de temps est-elle déjà attachée » ? Demandais-je à la mère. Elle m’expliqua que les trois dernières semaines, elle n’avait pas arrêté de parler, jour et nuit, sans manger ni dormir ; quand on lui apportait à manger, elle prenait l’assiette et la jetait contre le mur. « Mais c’est cruel de l’attacher avec des fils de fer. Pourquoi n’utilisez-vous pas quelque chose qui ne puisse pas la blesser ? »
« Nous avons déjà tout essayé. Elle casse les cordes les plus solides, ensuite elle s’enfuit et nous ne pouvons plus la rattraper : elle va dans les champs et les jardins des voisins pour arracher les choux, le maïs et les autres légumes. Elle dévaste tout, les gens ont peur d’elle, les hommes la battent avec des bâtons et lâchent leurs chiens contre elle ».
Cette femme me regarda, les larmes aux yeux : « Peux-tu te représenter ce que signifie d’avoir un tel enfant pour le cœur d’une mère ? Ma fille déchire aussi ses habits en lambeaux et se promène nue. Elle est très dangereuse. Viens regarder mon étable : je n’ai plus de vache, plus de chèvre, plus de mouton : j’ai sacrifié aux esprits tous les animaux que je possédais. Les vaches que je n’ai pas sacrifiées, je les ai vendues afin de payer les sorciers. Maintenant je suis complètement démunie et je n’ai plus d’argent. Je suis au bout de mes ressources ». … lorsqu’elle est fini, j’ai cru que mon cœur allait s’arrêter de battre. Intérieurement j’ai crié à Dieu : « Oh ! Seigneur tu es toujours le même Dieu qu’auparavant. Ne peux-tu pas intervenir ? »
Relever le défi
Puis je suis allé chez quelques-uns de mes coéquipiers pour leur raconter ce que je venais de vivre ; je leur ai demandé s’ils ne voulaient pas prier avec moi pour cette fille. Mes parents furent d’accord de lui préparer une chambre où nous pourrions la loger pendant que nous prierions pour elle. Avec plusieurs hommes, nous sommes allés la chercher pour la conduire dans la maison de mes parents. Entre-temps, toute la région, toute la tribu avait été mise au courant de cette affaire. Je dis à mes amis : « Regardez, depuis des années nous avons prié pour un réveil, mais en vain. Peut-être est-ce là, maintenant, l’étincelle qui va faire prendre le feu : si cette fille est guérie, le réveil peut éclater, parce que toute la tribu, le roi, les enfants, jeunes et vieux, tout le monde connaît cette fille. Quelle victoire ce serait pour notre Seigneur Jésus, si cette fille était guérie : alors les Zoulous reconnaîtraient que Jésus est le seul vrai Dieu. »
À peine était-elle entrée dans la jolie chambre qui lui avait été préparée, qu’elle commença à renverser la table est à démolir les chaises. Finalement nous avons dû sortir tous les meubles sauf le lit. Mais quand elle a commencé à en arracher les ressorts, nous l’avons aussi enlevé pour ne laisser qu’une natte et une couverture. Notre protégée continua en cassant les vitres et les fenêtres : en quelques heures, la chambre ressemblait à une porcherie habitée non pas par un seul, mais par plusieurs cochons. Pendant trois semaines, nous avons prié jour et nuit, mais la fille n’a pas été guérie. J’étais à bout, proche de la crise de nerf. La fille, elle, chantait sans cesse ses chants diaboliques. Quelqu’un me conseilla alors d’invoquer le sang de Jésus : ce que le diable craint et qui le fait fuir ; cela aussi fut sans succès ; au contraire, la fille commença à blasphémer le sang du Seigneur Jésus, blasphèmes que seul le diable peut inspirer. … Je ne pouvais pas comprendre tout cela : nous avions fait ce que la Bible enseigne, mais quelque chose ne fonctionnait pas. La théorie était exacte, mais la pratique ne la confirmait pas.
…
Que devrais-je faire ? Retourner vers la mère et lui dire que sa fille n’était pas guérie ? Tous les gens de la région savaient bien que nous, les chrétiens, nous étions en train de prier pour cette fille. Ils avaient entendu quand j’avais prêché : « N’allez pas chez les sorciers, ne sacrifiez pas des bœufs et des chèvres aux esprits : Jésus et la réponse à tous vos problèmes. Venez à lui ». Ils attendaient pour voir ce qui se passerait. Et maintenant les chrétiens échouaient ; de toutes nos forces nous avions prié : «Oh Dieu, ce n’est pas notre nom qui est en jeu mais le tient ; ils diront : c’est leur Jésus qui a échoué ». Mais le ciel était comme fermé. Aucune réponse à nos prières. Finalement nous avons tout abandonné et la fille a été ramenée chez elle.
Le désappointement de l’échec
Après ces évènements je suppliais le Seigneur : « Oh ! Dieu, je te demande de m’envoyer à un autre endroit, je ne peux plus me tenir devant ces gens pour prêcher. Je dois être honnête envers eux et je ne peux pas défendre quelque chose qui ne marche pas dans la pratique. Également vis-à-vis de moi-même, je dois être honnête, car j’ai un cœur et une conscience ; je ne pourrai quand même pas aller vers ces gens et leur expliquer qu’il n’y a pas de Dieu et que la religion des Blancs ne vaut rien. Le mieux serait d’aller à un autre endroit. »
…
À partir de ce moment-là, je n’arrivais plus à croire que la Bible est la Parole de Dieu et que tout ce qu’elle contient est la vérité. Peut-être une partie est-elle exacte et une autre fausse ; je rejetais tout ce qui ne correspondait pas à mon expérience ou à mes raisonnements ; j’étais comme un fou, assis sur un trône, pensant pouvoir juger ce qui est la vérité et ce qui ne l’est pas : « Telle chose est vraie encore aujourd’hui mais telle autre ne l’est plus. C’était valable il y a 2000 ans, mais plus aujourd’hui. Les choses ont changé, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que tout ce que la Bible dit soit vrai. »
…
J’étais certain que Dieu m’avait appelé à prêcher l’Évangile. J’avais prêché pendant 12 ans et je ne pouvais même pas montrer 12 personnes qui soient des chrétiens selon les normes bibliques. Je me rappelais des paroles de l’apôtre Paul dans 2 Timothée 3/1 et 5 : « Dans les derniers jours il y aura des temps difficiles. Il y aura des gens qui auront l’apparence de la piété, mais qui renieront ce qui en fait la force. Éloigne toi de ces hommes là ». Où sont les gens qui ont cette force dont la Bible parle ? Je n’avais pas cette force, je ne pouvais pas continuer ainsi … prêchant une doctrine que la pratique ne confirmait pas ».
Commentaire du Sarment
Dans la suite de l’histoire, qu’on peut lire dans le petit livre « Réveil parmi les zoulous », l’auteur Erlo Stegen a pourtant continué son ministère de la prédication durant six ans. L’épreuve difficile qu’il a vécue l’a placé en face d’une réalité douloureuse, et il a repris le chemin de la Bible avec un autre cœur. Puis il a entraîné son église de Zoulous dans une étude biblique approfondie et honnête – c’était le besoin – en les retrouvant deux fois par jour, le matin avant de commencer la journée et le soir après l’avoir terminée. En soi, l’existence de cette étude, et le fait qu’elle soit suivie dans de telles conditions, était déjà un miracle, et témoignait d’une soif de vivre quelque chose d’authentique.
« Plus nous avancions dans l’étude des Actes des apôtres, plus nous vivions un brisement intérieur… nous étions en 1966, et lorsque nous avons regardé aux chrétiens de l’église primitive de manière approfondie, nous avons dit : « nous sommes éloignés de cette église non pas seulement de 2000 ans, mais autant que l’Orient l’est de l’Occident ». À cette époque-là, nous n’étions environ une quarantaine de chrétiens ; mais combien y avait-il de frictions et de disputes parmi nous ! Combien de fois ai-je dû être un médiateur de paix car celui-ci ne pouvait pas supporter cet autre ; l’un critiquait l’autre et au lieu d’aller vers son adversaire et de mettre la chose en ordre avec lui, il préférait parler de ses fautes derrière son dos … je me demande si aujourd’hui nous avons le droit de nous nommer « Église de Christ », lorsque nous voyons tout ce qui se passe… il est devenu clair pour nous que nous n’avions aucun droit d’ouvrir nos bouches et de prêcher au monde et aux Zoulous païens, si nous ne pouvions pas dire auparavant : regardez-nous ».
Le réveil arrive 6 ans plus tard
Le réveil parmi les Zoulous s’est ensuite déployé pour se déverser partout et donner naissance à une œuvre de l’Esprit reconnue mondialement. Des milliers de guérisons, de délivrances et de conversions. Finalement, c’est l’échec et le désappointement qui ont servi de fondations. Ce réveil commencera par une œuvre profonde de la vérité, (pas de la puissance) qui a remis en question les habitudes religieuses et leurs illusions, la superficialité, les compromis avec le péché, l’égocentrisme et l’orgueil de chacun, en un mot : une profonde repentance personnelle et communautaire, qui a pris un certain temps pour arriver à maturité et qui était le préalable de la puissance de vie et de résurrection.
60 ans plus tard, et alors que la Mission Kwasizabentu vient de réunir en mars dernier plus de 2000 pasteurs issus de 5 continents, le mouvement est cependant soupçonné, dans quelques pays, de dérives sectaires en raisons d’allégations de divers abus (financiers, physiques, sexuels, psychologiques, spirituels, etc…).