J’ai fait cette photo dans une église du Burkina Faso l’année dernière. C’était dans le quartier de Bonheur ville, à Ouagadougou. Il y avait un panneau d’affichage au fond de la salle, comme dans n’importe quelle église, avec les rendez-vous de la semaine, les horaires des réunions, etc.

L’affiche a accroché mon regard : elle devait se trouver là depuis un certain temps, à en juger par l’état du feuillet, abîmé par le temps (et visiblement : les intempéries ! les églises africaines ne sont pas aussi étanches que les nôtres !). C’était devenu une chose usée, salie, qui ne correspondait plus à aucun critère décoratif, n’ayant plus rien pour attirer les regards. Mais personne n’avait osé la retirer, sans doute à cause de la force du message.

La prophétie de l’ancien monde 

Bien sûr, il peut paraître réducteur, ce message, parce que le critère d’authenticité du vrai prophète n’est pas forcément d’être lapidé, mais l’auteur a sans doute pensé aux dérives de la prophétie positive, qui donne des messages qui sont davantage des massages, et qui creuse le lit de l’erreur, pour finir par ne servir qu’à satisfaire le désir d’entendre des choses agréables. 

Bien évidemment, canaliser la prophétie pour en faire une expression exclusivement négative posera d’autres problèmes et ne correspondra pas à la réalité de l’équilibre spirituel : « Celui qui prophétise … parle aux hommes, les édifie, les exhorte, les console » (1 Corinthiens 14 : 3). 

Mais il faut reconnaître que dans les milieux charismatiques, l’emphase s’est déplacée sur la « consolation », davantage que sur « l’exhortation » : parce qu’il ne faut pas choquer, il faut respecter les gens, et il ne faut pas que les néophytes se sentent mal à l’aise. Graduellement, le glissement devient la normalité « spirituelle » qui se décline comme une règle non-écrite : « l’essentiel est de se sentir bien, Dieu étant un Dieu d’amour ».

«Poursuivez l’amour, et desirez avec ardeur les dons spirituels, mais surtout de prophetiser »

1 Corinthiens 14/1

Recherchons la prophétie

Un pasteur tweete ses vœux 2021 : « L’année se termine, ne regardons pas à nos échecs, nos manquements, mais à sa grâce qui nous a soutenus ! Avançons sans lâcher sa main ! ». 

C’est un bon exemple : oui, il est important de consoler, mais il ne faudrait pas confondre SE consoler, avec la consolation de l’Esprit. Nous sommes parfois un peu trop prompts à nous consoler, à nous dédouaner, ce qui revient à ne jamais examiner la causes de nos échecs, ce qui stérilise toute remise en question de nos fonctionnements. Un autre manière d’esquiver la zone de la repentance, si productive spirituellement.

Bien sûr, il faut encourager le peuple à ne pas lâcher Sa main, mais il n’est pas interdit de rappeler (brièvement) que sans la croix (la nôtre), nous lâcherons sa main. C’est une phrase dure à écrire, dure à dire, et difficile à entendre. Pourtant, c’est la base de la vérité : on ne PEUT PAS suivre Jésus sans prendre sa croix chaque jour. L’évangile du bonheur, du plaisir et de la facilité se fracasse littéralement sur le récif de cette vérité-là.

La partie du prix à payer, du coût de la foi véritable, ne doit pas être occultée. Disons avec un peu d’humour que le fait de ne pas lâcher sa main, ça peut nous coûter un bras.

Ainsi parle l’Éternel : placez-vous sur les chemins et regardez, et demandez quels sont les anciens sentiers, quelle est la bonne voie et marchez-y. Et vous trouverez le repos de vos âmes !

Jérémie 6/16

L’amour de la vérité, c’est l’amour de toute la vérité

À l’heure de se souhaiter « une bonne année », que dirait le prophète de l’ancien monde, celui dont parle l’affiche de l’église évangélique de Ouagadougou ?

Il dirait sans doute : prenez votre vie (spirituelle) en main ! PRENEZ la croix, PRENEZ l’épée dans une main et l’outil dans l’autre, sur le chantier de la maison de Dieu.

PRENEZ l’armure complète de Dieu. PRENEZ le casque du salut. PRENEZ le bouclier de la foi. PRENEZ la ceinture de la vérité. Ne vous attendez pas à recevoir passivement ces choses, car elles se prennent, de haute lutte.

Reprenez le terrain perdu ! S’il le faut, sentez votre misère, et souffrez de la frustration de la présence de Dieu, car si vous n’en souffrez pas c’est que vous êtes anesthésiés. C’est elle qui rend notre foi ardente comme un feu. 

Ne vous laissez pas bercer par le positivisme ambiant (demain sera meilleur qu’aujourd’hui), endormir par une fausse foi. Les faux courants prophétiques inspirent au peuple une fausse confiance (Jer. 28/15) : « Ils disent à tous ceux qui suivent les penchants de leur cœur : il ne vous arrivera aucun mal » (Jer. 23/17).

En refusant de dire ouvertement, d’enseigner, de prophétiser, qu’il arrivera du mal en réponse à la désobéissance, à l’individualisme, à l’égocentrisme, au narcissisme, à la recherche du confort religieux, en un mot : « à suivre les penchants de son cœur », nous contribuerons à inspirer une fausse confiance au peuple de Dieu.  

A contrario, « Si tu honores l’Éternel en ne suivant point tes voies, en ne te livrant pas à tes penchants et à de vains discours, l’Eternel sera toujours ton guide, Il rassasiera ton âme dans les lieux arides, et il redonnera de la vigueur à tes membres; tu seras comme un jardin arrosé, comme une source dont les eaux ne tarissent pas» (Es. 58/13 et 11).

« Si vous voulez être aimés : prêchez le bonheur. Si la reconnaissance vous est égale, alors prêchez la sainteté »

Léonard Ravenhill