Combat contre le cancer/2

Quand on lutte avec le cancer et avec la mort, on risque de se trouver devant des virages inattendus. Un éclair de joie, au milieu de nuages sombres, qui semblaient annoncer un violent orage et se retirent soudain pour faire place au soleil et à l’espoir de la proche arrivée du printemps. Ou, au contraire, un ciel d’airain, lorsque notre foi et notre espoir plongent dans la fosse de la dépression.

Quand j’ai envoyé le manuscrit de ce livre, pour qu’il soit publié, je me sentais remarquablement bien, à part le mystérieux mal de dos qui me gênait depuis trois ou quatre mois. “Comme tu as l’air en pleine forme”, me disait-on presque partout. Et c’est ainsi que je me sentais. J’avais bon appétit, mon poids restait normal. Tout allait bien !

Brusquement tout changea.

Tout à la joie d’avoir repris le travail, surtout avec mon équipe, je me lançais, de toutes mes nouvelles forces, dans tout ce que je pouvais entreprendre. Après le congrès pour pasteurs en Suisse, nous fîmes des visites passionnantes à Manchester, à l’île de Wight, à Belfast et à Dublin; j’eus de nombreux engagements pour prêcher à Londres, des émissions et des écrits à préparer. Je savais que c’était trop, mais partout où nous allions, l’enthousiasme des foules surpassait notre attente. À un culte du Renouveau Diocésain dans la cathédrale de Southwark (huit cent places assises) nous vîmes venir environ deux mille personnes. L’automne 1983 fut une période où Dieu semblait agir avec une puissance inhabituelle.

Puis mon corps protesta contre toute cette activité par la crise d’asthme la plus violente qui m’ait frappé depuis de nombreuses années. Dans le passé, mes crises avaient pu être rapidement maîtrisées par un traitement aux stéroïdes. Je repris ce traitement mais mon asthme continua sans amélioration, me causant des nuits blanches et beaucoup de malaises. Un des effets secondaires fut l’apparition très désagréable du muguet dans ma bouche, pendant notre tournée en Irlande.

Mon asthme continuait à empirer, de sorte qu’on me prescrivit la dose la plus forte de stéroïdes que j’ai jamais prise, ce qui aggrava encore le muguet. Grâce à la générosité de certains amis intimes, et avec les encouragements de beaucoup, y compris Anne, je pris l’avion pour la Californie. Je désirais que l’on prie spécialement pour moi dans l’église de John Wimber. Car j’avais l’impression de perdre le combat.

Mon séjour là-bas se limita à une semaine. Je fus magnifiquement accueilli par chacun, entouré d’affection fraternelle, de compassion et de soutien par la prière. Chaque jour, une équipe différente de chrétiens expérimentés dans le ministère de la guérison priait pour moi, pendant deux à cinq heures par jour. Malgré cela, pour une raison quelconque, tout semblait empirer. L’asthme persistait, de sorte que je dormais mal chaque nuit; mes jambes, mes chevilles et mes pieds enflèrent comme des ballons; mon abdomen se mit à grossir à une vitesse étonnante, jusqu’à ce que j’aie l’air d’une femme enceinte de sept mois ! Par ailleurs, je n’avais plus que la peau sur les os. Au lieu de revenir de Californie avec la joie d’une santé renouvelée, comme je m’y étais attendu, je revins à la maison dans un état lamentable.

Il fallu effectuer d’énormes changements. Tous mes engagements pour prêcher furent immédiatement annulés, même ceux qui concernaient des rencontres spéciales en Californie, Norvège, Suède, et à Vancouver, pour lesquels on avait fait des projets précis depuis deux ans. Mon équipe devait être licenciée au plus tard pour la fin avril. Je luttais pour ma vie.

“Dieu n’a rien fait pour David”, commençait-on à dire. “Nous avons prié, et rien ne s’est passé !”. Du point de vue médical, ils ont raison. Je suis un cancéreux assez typique. Des rémissions temporaires peuvent se manifester, mais “tout peut exploser” d’un seul coup. En ce moment, on ne sait pas avec certitude quels sont les symptômes provoqués par les stéroïdes, que je prends depuis deux mois. J’ai pris le dernier, je l’espère, ce matin, car l’asthme s’est atténué. Mais il n’y a aucun doute que mon foie a beaucoup grossi à cause d’une activité soudaine des cellules cancéreuses.

Cependant Dieu est loin d’avoir été inactif dans ma vie. Vers une heure du matin, le dimanche de l’Avent, je fus pris par une nouvelle crise d’asthme. Dans ma faiblesse, je criai à Dieu pour qu’il me parle. Écouter Dieu est une chose que je ne fais pas facilement, mais, entre une et trois heures du matin, il me parla si puissamment et cela me fit si mal que je ne m’étais jamais senti aussi profondément brisé devant Lui — et je le suis encore.

Il me montra que toutes mes prédications, mes écrits et tout le reste de mon ministère ne valaient absolument rien (italiques dans l’original). Ce qui importait était ma relation d’amour avec Lui. En fait, mon activisme avait étouffé l’intimité étroite que j’avais connue avec Lui pendant les quelques premiers mois après mon opération.

Dieu me montra aussi que tout “amour” pour Lui n’avait pas de sens si je n’étais pas capable d’aimer vraiment du fond du cœur mon frère ou ma sœur en Christ.

Au fur et à mesure qu’Il me rappelait divers noms, je commençais à écrire des lettres à une douzaine de personnes, leur demandant pardon de les avoir blessées, d’être encore intérieurement en colère contre elles, ou parlant de tout autre tort que j’avais à leur égard. Ce fut l’émondage le plus douloureux que j’ai connu, une purification sans précédent. Mais ce fut fécond ! Déjà quelques réponses à mes lettres m’ont fait fondre en larmes.

Quoiqu’il puisse m’arriver encore sur le plan physique, Dieu opère en profondeur dans ma vie. Le défi qu’Il me lance peut se résumer en trois mots : « Cherche ma face”. Je ne m’accroche pas maintenant à la vie physique, quoique je continue à croire qu’Il peut et veut me guérir; je m’accroche au Seigneur. Je suis prêt à partir et à être avec Lui pour toujours. Ce serait littéralement le Ciel. Mais je suis aussi prêt à rester, si c’est ce qu’Il veut.

“Père, que ta volonté, et non la mienne, soit faite”. Dans cette position de sécurité, j’ai expérimenté, une fois de plus, son amour parfait, un amour qui bannit toute crainte.

Dans les quinze jours qui suivirent ces dernières pages de son livre, David eut l’occasion et la joie de prêcher à deux reprises. Puis son état empira durant un mois, au terme duquel il s’éteignit dans la paix, le 18 février 1984.

Extrait de “Ne crains aucun mal”, (CLC), de David Watson (pasteur anglican)

http://www.lesarment.com

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